Nous nous intéressons à une population s'adaptant à un environnement changeant continuellement. De nombreux modèles de génétique quantitative se sont intéressés à ce problème dès les années 1990 et sont actuellement fréquemment discutés pour mieux comprendre les conséquences des changements climatiques contemporains et la capacité des espèces à persister et s'adapter à ces changements. Ces modèles supposent qu'il existe une relation entre le phénotype des individus et leur contribution à la croissance de la population, qui permet de définir un phénotype optimal. La valeur phénotypique optimale change au cours du temps. On prédit alors que la population évolue à terme aussi vite que l'optimum se déplace mais avec un retard caractéristique. Si ce retard est trop grand, la population n'est pas viable. Ces modèles prédisent en particulier une vitesse critique du changement climatique au delà de laquelle une espèce ne peut persister. Des études théoriques plus récentes ont montré que certaines formes de la relation entre phénotype et croissance de la population pouvaient conduire à des dynamiques plus complexes, avec des points de bascule dans la vitesse du changement climatique où la population passe brutalement d'un état viable à non viable avec un retard adaptatif augmentant sans limite. Ces points de bascule sont aussi associés à une forte dépendance aux conditons initiales, où une population peut se maintenir ou non dans un climat changeant en fonction de sa mal adaptation initiale. Ici nous revisitons ces résultats en proposant que ce type de forme de la relation entre phénotype et valeur sélective, loin d'être une bizarreté, émerge naturellement de nombreux scénarios écologiques réalistes, dès que les populations sont hétérogènes et structurées.